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Rubrique II

Rubrique III

Rubrique IV

Rubrique V





Le 10 septembre 1997, la Convention sur l'évaluation de l'impact sur l'environnement dans un contexte transfrontière, signée à Espoo (Finlande) le 25 février 1991, entre en vigueur. C'est le premier acte conventionnel qui traite exclusivement des EIE dans un cadre transfrontière. Elle a été signée sous les auspices de la Commission économique des Nations Unies pour l'Europe (CEE-ONU). Bien qu'étant une Convention régionale , son contenu est déterminant dans la mesure où il prévoit une élaboration précise des EIE, en coopération étroite avec d'autres Etats. L'environnement n'est plus un problème strictement national, mais il doit être préservé par un ensemble d'Etats qui mettent leurs efforts en commun en vue d'un but commun.

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Champ d'application géographique

Jusqu'à présent, seulement 18 Etats l'ont ratifiée. Cependant, 16 autres Etats l'ont signée, de sorte que son champ d'application est appelé à s'étendre dans un futur proche.

La Convention d'Espoo (ci-après, Convention)s'applique à l'ensemble du territoire de chaque Etat contractant (également aux eaux territoriales, l'air, aux zones souterraines). Elle s'applique également aux zones sur lesquelles l'Etat exerce une souveraineté exclusive particulière.

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Champ d'application temporel

La Convention d'Espoo est entrée en vigueur le 10 septembre 1997. Il s'agit cependant de savoir si la Convention peut être appliquée avant son entrée en force, ce que la Finlande, par exemple, a fait. En général, on peut considérer que, même si un plan d'une activité a été élaboré avant l'entrée en vigueur de la Convention et qu'il n'a pas fait lui-même l'objet d'une EIE, l'activité projetée rentre potentiellement dans le champ de la Convention (à condition de figurer dans les Appendices).

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Définitions

La Convention parle d'un impact transfrontière préjudiciable important sur l'environnement que certaines activités pourraient avoir. Par ''activité'', on entend une activité qui doit faire l'objet d'une décision d'une autorité compétente, conformément à la procédure nationale établie dans le pays. Cela signifie que les administrations nationales compétentes en matière d'environnement vont définir les activités qui doivent faire l'objet d'une décision et donc qui rentrent dans le champ d'application de la Convention. Cependant, les Etats ne sont pas totalement libres d'adopter un système national d'autorisation des activités, puisqu'ils doivent prendre en compte au moins les activités prévues à l'Appendice I. Le terme ''activité'' s'applique aussi aux politiques, plans et programmes.

L'impact est défini très largement, sans préciser quels types d'effets l'activité doit engendrer. Il n'y a donc pas de catégories limitées d'effets, et les dégradations de l'environnement dues au bruit, par exemple, pourraient être comprises également dans ces effets.

A l'article I (vii) de la Convention, on peut aussi constater que le concept de l'environnement couvre de nombreux domaines : il comprend notamment des atteintes à la santé, la sécurité, la faune et la flore, etc. L'interaction entre ces derniers facteurs, les monuments historiques ou autres constructions sont aussi pris en compte. Le patrimoine culturel et les conditions socio-économiques sont inclus, mais indirectement ; ils ne sont pris en considération que dans la mesure où ils résultent de la modification des facteurs principaux.

L'article I (viii) traite enfin du caractère transfrontière de l'impact d'une activité : sont visées les zones relevant de la juridiction d'une Partie contractante atteintes par une activité dont l'origine physique se situe en tout ou en partie dans la zone relevant de la juridiction d'une autre Partie. Ainsi, les impacts dans des zones relevant de la juridiction d'Etats non contractants sont exclus de la Convention. L'Etat touché et l'Etat d'origine doivent être des Parties à la Convention.

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L'élaboration de la procédure "transnationale"

La Convention d'Espoo se compose essentiellement de normes de procédure obligeant la Partie d'origine à établir certaines institutions nationales et mettre en place la procédure transnationale d'EIE, de telle sorte que la Partie touchée et le public puissent y participer. Dans cette procédure, les Parties doivent faire un effort important de coopération et de bonne volonté. Comme je l'ai déjà mentionné (voir ch. 2), une décision sur l'activité sera prise à l'issue de l'EIE, mais l'EIE ne crée pas de décision sur cette activité. Elle ne fait que rassembler un faisceau d'informations pour le processus de prise de décision.

Lorsque la Convention est applicable, le système national d'EIE se transforme en système transnational d'EIE. L'autorité nationale de la Partie d'origine devient alors une autorité transnationale qui va prendre la décision finale. En s'en tenant à l'objectif de la Convention, il s'agit de s'assurer que les procédures nationales d'EIE sont capables d'entreprendre une procédure transnationale d'EIE en ce qui concerne les activités de l'Appendice I.

En effet, il faut que les procédures de chaque Partie contiennent des dispositions qui prévoient une procédure transnationale. Afin de rendre les principes contenus dans la Convention le plus efficaces possible, les Parties contractantes devraient, autant que faire se peut, adapter leur droit national, pour éviter d'être en contradiction avec ladite Convention.

L'article 2(1) prévoit que "les Parties prennent, individuellement ou conjointement, toutes mesures appropriées et efficaces pour prévenir, réduire et combattre l'impact transfrontière préjudiciable que des activités proposées pourraient avoir sur l'environnement."

Dans cette optique, l'autorité transnationale qui octroie les autorisations doit tenir compte des résultats des études diverses menées par les Parties, et ne peut pas prendre de décisions non conformes à leur accord. L'obligation énoncée à l'article 2 (1) contient des termes assez généraux, mais oriente, de ce fait, la décision qui va être prise. Il va s'agir de mettre en balance les différents intérêts et les inconvénients d'une activité projetée : il faut, d'une part, estimer les coûts résultant des effets négatifs que peut entraîner l'activité, et, d'autre part, évaluer les bénéfices que celle-ci rapporterait, par exemple, la création de nouveaux emplois.

C'est l'autorité transnationale qui va décider si les avantages de la réalisation de l'activité l'emportent sur les coûts des effets négatifs. Puis, le résultat de cette mise en balance va déterminer si l'activité peut être effectuée ou non et sous quelles conditions, en prenant en compte les accords passés entre les Parties concernées sur les mesures destinées à atténuer les probables impacts transfrontières.

Etant assez générale, cette disposition requiert différentes mesures préventives selon le degré de gravité de l'atteinte potentielle. Le problème réside dans le fait qu'il est bien souvent difficile de respecter ce qui a été prescrit dans l'EIE. Le caractère préjudiciable important de l'atteinte ne facilite pas la démarche. En effet, cette notion n'est pas définie dans la Convention, si bien que même si toutes les mesures semblent avoir été prises, il n'y a simplement pas de moyens d'obtenir une certitude absolue de sécurité. Par exemple, dans le cas d'activités entraînant une faible pollution de façon continue, comment déterminer ce qui doit être considéré comme préjudiciable important ? A cause de la nature hautement risquée de certaines activités, les accidents peuvent arriver, quand bien même des mesures de prévention sont envisagées, car le degré d'atteinte à l'environnement à long terme est difficilement mesurable. Le risque de sous-estimer les impacts potentiels demeure.

Pour tenter de combler cette lacune, l'article 2 (2) fait référence à l'Appendice I qui contient une liste d'activités pour lesquelles l'EIE est requise. Si une activité n'est pas prévue par l'Appendice I mais est toutefois susceptible d'avoir un impact transfrontière préjudiciable important, il faut alors se référer à l'Appendice III. Dans l'Appendice I, il y a donc une présomption d'impacts préjudiciables importants pour les activités mentionnées ; cela permet déjà d'entreprendre une EIE dans tous ces cas. Cette liste n'étant pas exhaustive, la Convention a voulu couvrir le plus grand nombre de situations (même celles qui n'ont pas été envisagées au moment de son élaboration) en prévoyant des facteurs qui pourraient servir de définition au caractère préjudiciable important, prévus à l'Appendice III.

L'article 2 (2) fait aussi référence à la participation du public. Le public doit pouvoir prendre part à la procédure d'EIE en tant qu'acteur indispensable à son élaboration. L'intervention du public est mentionnée également aux articles 2 (6), 3 (8) et 4 (2). En vertu du principe de non-discrimination, la participation du public de l'Etat d'origine doit être équivalente à la participation du public de l'Etat touché.

Si la participation du public est prévue, aucune disposition ne fournit cependant d'indications sur la manière dont il va intervenir, ni à quelle étape de la procédure d'EIE. En revanche, le moment de son intervention correspond à la date à laquelle il est informé, qu'il s'agisse du public de la Partie d'origine ou de la Partie touchée.

L'article 2 (3) rappelle que la Partie d'origine doit procéder à l'évaluation d'impact avant toute décision d'autorisation d'une activité prévue aux Appendices I et III. Cela suppose que les activités listées dans l'Appendice I doivent être soumises à autorisation dans le système national. Dans le cas où le régime d'autorisation nationale ne couvrirait pas toutes les activités de l'Appendice I, la procédure serait amputée de la partie finale, puisqu'elle est censée se terminer avec la décision de l'autorité de la Partie d'origine, décision prévue à l'article 6. C'est pourquoi, en général, les Parties contractantes doivent prévoir un système de contrôle pour s'assurer que toutes les activités contenues dans l'Appendice I sont couvertes par le régime d'autorisation.

L'article 2 (4) prévoit la notification de l'activité proposée aux Parties touchées. Cet aspect sera développé dans l'examen de l'article 3.

L'article 2 (5) étend le champ de la Convention aux activités susceptibles d'avoir des effets transfrontières préjudiciables importants , mais qui ne figurent pas dans l'Appendice I. Si les Parties ne peuvent pas se mettre d'accord sur le degré de gravité de l'atteinte, elles sont invitées à négocier ou à adopter toute autre méthode de règlement des différends. Elles peuvent soumettre leurs différends à la Cour internationale de Justice ou à la procédure d'arbitrage prévue à l'Appendice VII, au cas où elles n'ont pas trouvé de solution en vertu de l'article 15.

L'article 2 (8) rappelle que la Convention ne touche pas aux renseignements prévus dans des législations ou règlements nationaux relatifs au secret industriel, national ou à la sécurité nationale.

L'article 2 (9) dispose que les Parties peuvent conclure d'autres accords bilatéraux ou multilatéraux qui prévoient des dispositions plus incisives que celle de la Convention. Cet article est développé par l'article 8 qui prévoit une coopération active entre les Parties, ainsi que par l'Appendice VI.

De même, la Convention s'applique, sous réserve des obligations de caractère international relatives aux activités susceptibles d'avoir un impact transfrontière important (la Directive communautaire, par exemple).

Les articles 3 à 10 règlent les étapes de la procédure d'EIE transnationale en tant que telle.

L'article prévoit l'obligation d'informer toute Partie pouvant être touchée par une activité menée sur le territoire de la Partie d'origine ou sous sa juridiction. La notification de l'activité va donner le droit à la Partie touchée de participer ou non à l'EIE. En général, elle a intérêt à participer à cette procédure, car dans le cas contraire, elle n'a plus le droit de s'opposer ultérieurement aux activités projetées par la Partie d'origine. Si elle accepte de participer à la procédure d'EIE, commence alors une série d'échanges d'informations entre les Parties concernées avant la constitution du dossier d'évaluation, prévue à l'article 4.

En cas d'omission de notification, les Parties peuvent recourir à une commission d'enquête, prévue à l'Appendice IV, pour obtenir un avis leur permettant de trouver un terrain d'entente.

Les articles 4 (2) et 5 rappellent l'importance de la participation de la Partie touchée et de son public au dossier d'évaluation. On évite ainsi que le dossier avantage trop la Partie d'origine et en devienne totalement inutile.

La décision définitive au sujet de l'activité doit être prise en fonction de toutes les informations recueillies, et peut être modifiée si des informations complémentaires sont à prendre en considération. En fait, la décision ne devient définitive qu'au moment où les travaux débutent.

L'article 7, qui renvoie à l'Appendice V, consacre un élément important, à savoir l'intégration d'un audit d'environnement. Cet audit vise à évaluer l'efficacité des mesures prises dans le cadre de l'EIE et à assurer un suivi de l'activité. De plus, il permet d'utiliser l'expérience faite pour les activités du même type. Cette disposition traduit la volonté de contrôler les activités à chaque étape de leur réalisation, et même plus avant. L'aspect moins réjouissant relève du caractère non obligatoire de cette démarche.

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Critiques à l'encontre de la Convention

La première critique que l'on émet à l'encontre de la Convention est le manque de participation accrue du public dans la procédure d'EIE. C'est, en fait, l'Etat d'origine qui règle la forme et le temps de participation concédés au public, alors qu'il aurait été souhaitable qu'il soit davantage impliqué, par exemple par une procédure indépendante de la procédure nationale. La Convention d'Espoo prévoit certes une participation du public, mais elle reste trop vague quant aux formalités à adopter. Elle ne prescrit rien dans ce sens et ne prévoit pas de degré d'intensité de participation, laissant ainsi une grande marge de liberté aux Etats, et risque de rendre illusoire la possibilité offerte au public d'intervenir et de faire respecter ses droits.

La deuxième critique concerne ''l'absence d'un contrôle collectif substantiel'' des activités menées par les Parties. En effet, quand la Convention vise les ''Parties concernées '', il s'agit des Parties d'origine et des Parties touchées. Mais, rien n'est dit sur les possibles droits des Parties qui ne se trouvent pas dans cette relation. La Convention ne prévoit donc pas de possibilité donnée aux Parties d'intervenir dans la procédure pour assurer une surveillance et un contrôle adéquats, si elles ne sont pas directement concernées par les effets d'une activité.

En parcourant l'ensemble du texte de la Convention, on peut constater que, d'une manière générale, les Etats évitent de prendre position à propos du régime de responsabilité intervenant dans le cas où les Etats ne suivent pas les conclusions des EIE dans leurs travaux . Il faudrait que les Etats prennent davantage au sérieux cette procédure, non comme une formalité gênante, mais comme un réel instrument de protection de l'environnement. A cet effet, il faudrait que les Etats dussent répondre de leurs omissions en matière d'EIE, omissions considérées comme de véritables violations internationales.

Le dernier aspect problématique concerne le manque de réciprocité dont le principe est prévu dans l'Appendice VI 2.b. de la Convention . En effet, l'harmonisation n'est pas un point fort dans l'application de la Convention. On rencontre beaucoup de situations dans lesquelles la Partie touchée a des dispositions dans sa législation nationale plus strictes que la Partie d'origine, ce qui peut entraîner un déséquilibre dans le fonctionnement prévu par la Convention.

Le principe de réciprocité exige un effort considérable de la part de toutes les Parties, mais est indispensable au respect de la Convention. Dans le cas contraire, les Parties seraient face à des problèmes insolubles qui réduiraient considérablement l'efficacité des dispositions de la Convention. Les réunions annuelles entre les Parties et le groupe de travail institué à l'issue de ces rencontres vont peut-être permettre de clarifier ces zones d'ombre et éviter les malentendus dus aux différentes applications au sein des législations nationales.

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